Ces deux années passées à Timezzoujine, un hameau dont le nom signifie "les coépouses" en rifain, reflétant la rivalité avec sa belle-mère Fatima ont été une véritable épreuve. Difficile pour une jeune citadine de se retrouver plongée dans une campagne reculée aux conditions sanitaires déplorables : l’eau devait être puisée à l’aide d’un âne, l’éclairage se faisait à la lampe à pétrole, et, en l’absence de sanitaires, il fallait se soulager en plein air.
Un lieu où les récits d’enlèvements, de cambriolages nocturnes et d’attaques de sangliers alimentaient l’angoisse. Mais l’adversité la plus pesante venait du rejet de sa belle-mère, enfermée dans une mentalité de rivalité et d’hostilité, comme le laissait entendre même le nom du village. Fatima ne lui laissa aucune place, la méprisant pour son origine citadine, son rifain imparfait et tout ce qui faisait d’elle une étrangère à ses yeux.
Être délaissée par son époux parti à 2 500 km et par sa propre famille à 120 km rendait l’épreuve d’autant plus lourde.
La naissance de ma grande sœur fut peut-être un refuge psychologique, mais elle n’atténua en rien la marginalisation orchestrée par Fatima, qui pesa lourdement sur sa santé, comme en témoigne l’hospitalisation qui suivit.